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Erreur de superficie « Loi carrez »

Erreur de superficie « loi Carrez » et action en diminution du prix de vente : la demande de désignation d’un expert judiciaire interrompt le délai d’un an.

​​L’article 46 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis impose la mention de la superficie de la partie privative dite de la « loi Carrez » dans toute promesse unilatérale de vente ou d’achat, tout contrat réalisant ou constatant la vente d’un lot ou d’une fraction de lot, la nullité de l’acte pouvant être invoquée sur le fondement de l’absence de toute mention de superficie.

Cet article dispose par ailleurs que :

 » Si la superficie est supérieure à celle exprimée dans l’acte, l’excédent de mesure ne donne lieu à aucun supplément de prix.

Si la superficie est inférieure de plus d’un vingtième à celle exprimée dans l’acte, le vendeur, à la demande de l’acquéreur, supporte une diminution du prix proportionnelle à la moindre mesure.

L’action en diminution du prix doit être intentée par l’acquéreur dans un délai d’un an à compter de l’acte authentique constatant la réalisation de la vente, à peine de déchéance. »

Se pose alors la question de savoir comment se calcule ce délai d’un an imparti à l’acquéreur pour intenter l’action en réduction de prix à due proportion de la moindre mesure, en particulier lorsque ce dernier saisit le juge d’une demande de désignation d’un expert avec mission d’établir la superficie exacte du lot vendu.

Dans l’espèce ici rapportée, la cour d’appel de Paris(1) a déclaré irrecevable l’action de la SCI acquéreur en retenant que celle-ci avait été intentée plus d’un an après la date de l’acte authentique (20 mars 2007) ayant constaté la réalisation de la vente et qu’elle était frappée de déchéance : au visa de l’article 145 du code de procédure civile, l’assignation en référé délivrée le 28 juin 2007, dont le dispositif tendait à la désignation d’un expert, n’avait pas eu selon les juges d’appel pour effet d’interrompre ou de suspendre le délai d’un an susvisé.

La Cour de cassation(2) casse et annule l’arrêt d’appel, se fondant sur l’article 2244 ancien du Code civil et l’article 46 de la loi de 1965 précité : « Qu’en statuant ainsi, alors que le délai d’un an prévu par l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965 pour engager l’action en diminution du prix de vente avait été interrompu par l’assignation en référé expertise, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; […]. »

Cette décision se situe dans la lignée de la jurisprudence antérieure : la Haute cour avait ainsi déjà jugé que s’agissant d’un délai de forclusion, l’action en justice, même intentée devant une juridiction incompétente, interrompt ce délai d’un an, sauf convention contraire des parties (art. 2241 nouveau du Code civil)(3).

En revanche, et puisqu’il ne s’agit pas d’un délai de prescription, ce délai d’un an n’est pas susceptible de suspension, par exemple lorsque les parties conviennent de recourir à la médiation ou à la conciliation (art. 2238 du Code civil), ou bien encore lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d’instruction présentée avant tout procès (art. 2239 du Code civil)(4).

Rappelons que contrairement à la suspension, lorsqu’il y a interruption du délai, le temps qui a couru depuis le départ du délai est définitivement perdu et ledit délai recommence donc à courir entièrement lorsque la cause de son interruption a pris fin. Enfin, un délai « préfix » n’est quant à lui susceptible ni d’interruption, ni de suspension.

(1) CA Paris 3 avril 2014, n° 11/19453.

(2) Cass. 3e civ. 12 novembre 2015, n° 14-18.390.

(3) Cass. 3e civ. 24 novembre 2006.

(4) CA Paris, pôle 4, 26 février 2015, n° 13/15050 ; CA Lyon 15 janvier 2013, n° 11/6387.

 

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